samedi 15 mars 2014

Une "philosophie" du yoga? - Partie 1

Quand on parle yoga à un occidental, il pense tout de suite à la pratique physique, les postures parfois compliquées ou qui semblent infaisables. Le yoga est devenu très populaire aux Etats-Unis et gagne l'Europe. Cette pratique ancestrale s'est donc modernisée, occidentalisée pour se conformer à une pratique plus "moderne" et influencée par le fitness : on voit émerger un yoga avec poids et lests par exemple.

Effet de mode? Sans doute mais avec cet effet positif de remettre au goût du jour une pratique ancestrale qui apporte un bénéfice physique et spirituel énorme aux pratiquants. D'ailleurs, certains yogas comme le hatha ou l'ashtanga (promis un autre article vient sur les principaux types de yoga) sont souvent pratiqués exactement tels qu'ils étaient pratiqués il y a 2000 ans.

Cependant, il existe une grosse différence entre le yoga moderne et le yoga traditionnel indien  : quand le yoga moderne ne concerne que la pratique des postures, le yoga indien désigne un véritable mode de vie dont la pratique des postures n'est qu'une des composantes. Voilà pourquoi vous voyez souvent le hashtag #yogaoffthemat sur les IG des yogis.



Ce "code de conduite" a été décrit dans un texte fondateur de la tradition indienne : les Yoga Sutra de Pantajali. Il s'agit d'un recueil de 196 aphorismes.

Attention, le yoga n'est absolument pas une religion mais une quête vers le bonheur. Il a donc influencé/été influencé pour le bouddhisme et l'hindouisme, principales religions indiennes qui se sont développées en parallèle.

Les principaux textes traditionnels indiens étaient de tradition orale et ont été retranscrits plus tard en sanskrit, langue riche et assez difficile à traduire. Les textes sont remplis de références indiennes en plus. Une traduction sèche est donc difficilement abordable pour nous occidentaux, surtout si vous n'êtes pas familiarisés avec les concepts indiens. Donc, les meilleures traductions sont en fait de celles qui transforment un poème ou 196 courtes phrases en un pavé pas très attirant il faut reconnaître.

Je vais donc essayer de suivre l'ordre du texte et vous exposer les principaux principes traditionnels du yoga et les expliquer dans le cadre d'une pratique comme dans la vie.

Le yoga au sens traditionnel du terme se compose de 8 piliers (A noter que le nom ashtanga fait justement référence à ces 8 piliers, "ashta": 8, "anga": membre ).


  1. Les Yama : il s'agit de 5 principes de vie en vue de vivre en harmonie avec les autres 

- AHIMSA : le principe de non-violence 

En sanskrit, la violence se traduit par himsa, le a- est donc une négation, il s'agit de s'abstenir de toute forme de violence physique, verbale ou mentale, envers les autres, comme envers les autres. 
Il s'agit d'éviter toute manifestation de violence : insultes, coups, ton désagréable mais aussi de pensée de jalousie, dénigrement, jugement envers autrui.

Il s'agit également d'exercer la compassion envers soi-même : ne pas se dénigrer, se dévaloriser mais aussi ne pas mettre en péril son intégrité physique ou se blesser pour accomplir une posture, ne pas se comparer aux autres et respecter son corps sur le tapis.

Comment fait-on alors? Au quotidien, on s'efforce de positiver, sourire à la vie, voir e bon côté d es choses. La première étape est d'être positif et ensuite de ne pas répondre par la violence à une provocation sinon un cercle vicieux s'installe et l'ahimsa s'éloigne certainement ;)

On ne demande à personne de changer mais d'adopter une attitude plus positive, ouverte et amicale. Je vous assure que cela change tout de seulement sourire. Il s'agit de comprendre aussi nos réactions, de se poser les bonnes questions sur soi-même d'apprendre à s'aimer et à s'accepter, ne pas en vouloir à la terre entière pour ses échecs, apprendre de ses erreurs.... 

Pour ma part, ce principe est tellement important qu'il est ancré/encré dans ma chair. Il signifie ne pas me punir, respecter et comprendre mes limites, m'accepter mais aussi et surtout respecter la vie de tous les êtres qu'ils soient humains ou animaux. Vient donc la question du lien entre le yoga et le végétarisme. Je lis parfois qu'il n'y a aucun lien. Je ne suis pas d'accord. Le yoga n'impose rien et il doit s'adapter à chacun effectivement. Mais si quelqu'un veut vraiment appliquer l'ahimsa dans tous les aspects de sa vie, le végétarisme s'impose naturellement. L'Ashtanga en fait une règle essentielle de la vie d'ashtangi. Ce principe est strictement appliqué dans la religion jaïne, bouddhiste (oui un schisme ne rend pas le végétarisme obligatoire mais je ne connais aucun bouddhiste pratiquant religieux ou pas qui ne le soit pas) et hindouiste. Comme je ne connais aucun yogi traditionnel qui consomme de la viande (je dis traditionnel n'est-ce pas).

La meilleure définition de l'ahimsa, pour moi, est toute trouvée : il s'agit du mantra Lokah Samastah Sukhino Bhavantu qui a plusieurs significations mais celle-ci est la plus courante : Que tous les êtres soient heureux et libres et que mes pensées et mes actions puissent y contribuer en quelque manière que ce soit.



Par contre, je reste convaincue que le yoga est avant tout un bienfait et qu'il n'y a pas de mauvais yogis, même mangeurs de viande. Mais le yoga est un cheminement qui peut conduire à s'interroger sur son alimentation, ce qui est bon pour nous et pour les animaux, l'environnement etc... Ce n'est pas une obligation, cela devient même une forme de violence s'il s'agit d'une contrainte. Chacun est libre de ses choix mais il est intéressant d'évoquer la question pour ceux que cela intéresse.

- SATYA : la vérité

Encore une fois, il y a bien un aspect personnel : la vérité implique l'intégrité et l'honnêteté en agissant selon sa propre volonté sans se préoccuper de l'avis ou du comportement des autres mais aussi un aspect vis-à-vis des autres : être sincère, dire la vérité tout en respectant l'ahimsa, bah oui, il ne faudrait pas en plus que la vérité fasse mal, ce qui n'est pas toujours simple à concilier .

Comment fait-on?  Ayez confiance en votre libre arbitre. Dire la vérité n'est pas un principe absolu. Parfois, ne pas être complètement honnête avec autrui ne contrevient pas à être vrai quand il s'agit de prendre soin de quelqu'un. Il faut avant tout être vrai avec soi.

Sur le tapis, il s'agira d'être soi-même : reconnaître une difficulté et adapter sa posture, exécuter une variante plus adaptée jusqu'à ce que la posture devienne confortable, faire son yoga pour son bien-être et non parce que c'est tendance/pour maigrir... 

- ASTEYA : le détachement 

Il s'agit ici de ne pas convoiter mais ce principe dépasse les biens matériels. En effet, la manifestation de convoitise la plus courante est de souhaiter le bien d'autrui, ce qui conduit à la jalousie et au vol mais il s'agit aussi de ne pas non plus monopoliser l'attention d'autrui en de longs discours à sens unique ou en leur faisant perdre leur temps; la convoitise concerne donc les biens mais aussi l'attention ou le temps.

Sur le tapis, le yogi peut vouloir atteindre la perfection de son voisin dans l'accomplissement d'une posture mais ne pas le jalouser. Il faut utiliser cette énergie en combativité, pugnacité pour pratiquer encore et encore et non pas en jalousant autrui.

Dans la vie, apprendre à se satisfaire de ce que l'on a (ceci n'exclut pas l'ambition mais tout le monde sait quand vouloir avancer devient négatif), ne pas jalouser autrui mais aussi arriver à l'heure et apprendre à écouter les autres et non monopoliser la discussion et couper la parole.

- BRAHMACHARYA : la modération

Dans le sens traditionnel, cela signifie que le yogi doit concentrer son énergie à la pratique du yoga (dans son sens large) et donc ne pas dissiper sa précieuse énergie en s'adonnant à des activités futiles (pour l'anecdote, le sexe est expressément cité - oui le yogi est abstinent lol). Il s'agit en fait de trouver l'équilibre et de concentrer son énergie sur des activités essentielles, se concentrer et ne pas se dissiper.

Sur le tapis, c'est assez simple : il faut être concentré pendant sa pratique, être attentif à son corps  et non aux bruits (oui les pets ou ventouses du voisin par exemple) ou aux voisins de tapis/

Dans la vie, savoir faire preuve de modération et d’efficacité dans tous ses aspects : réflexion, action.

- APARIGRAHA : la non-avidité (toujours le a- pour signifier la négation)

Il rejoint Asteya mais vise directement les possessions personnelles. Il s'agit tout simplement de ne pas succomber aux dictas de notre société de consommation : accumulation de choses, acheter le dernier modèle mais aussi vouloir toujours faire mieux personnellement de manière maladive.

Tout est encore une question d'équilibre : se poser la question du réel besoin, de la compulsion d'achats...

Je viens seulement d'exposer un pilier des Yoga Sutra (oui je sais il y en a encore 7 ahhah). Je suis une bavarde incorrigible même par écrit. Mon propos ici n'est pas d'être moralisatrice mais d'exposer simplement et de manière accessible un ouvrage intemporel à mon sens. Il a pour but de nous interroger un moment sur notre quotidien et pourquoi pas de tenter d'appliquer un ou deux principes au quotidien.

La grande question je suppose : et toi tu les suis? J'essaie au quotidien de suivre ces principes. Cela date de bien avant ma pratique du yoga puisque j'ai étudié le bouddhisme theravada bien avant tout ça et que je m'applique depuis à pratiquer les enseignements de Bouddha au quotidien. Je suis juste humaine, ce qui signifie que oui, il m'arrive encore d'acheter des choses dont je n'ai pas besoin ou de critiquer etc... et j'assume mais une application régulière de ces principes couplée à une pratique du yoga m'a apportée une vraie quiétude d'esprit, un positivisme et un réel bien-être.

A bientôt pour le deuxième pilier, les niyama.

Namaste yoginis






3 commentaires:

  1. keep going jess' ! c'est super intéressant toutes ces explications. Ça me pousse vraiment à m'y intéresser. Je vais regarder sur Lyon ce qu'il se fait, sinon tu aurais des liens vers des cours vidéos qui pourraient être intéressants pour un début ?

    Dans la même veine, je t'ai déjà dit que le Bouddhisme m'intéressait, tu aurais des ressources à ce sujet aussi ?

    Merciiii
    Jérèm'

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    1. Un centre bouddhiste le plus proche et de commencer l'étude des textes (cela n'engage à rien promis). Sinon il doit bien y avoir des cours par correspondance, je peux demander à mon guide ce qu'il y a sur Lyon si tu veux.

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  2. Merci Jérémie ;) alors j'ai des liens dans l'article sur le yoga à la maison, après il y a des tas de vidéos sur YT, difficile de faire un tri (ma préférée est Kino yoga si jamais). Tout dépend après de ce que tu recherches (oui je sais pas évident de se repérer dans tout ça). Je vais regarder ça.
    Si tu t'intéresses au bouddhisme, le mieux est de faire ce que j'ai fait : contacter

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